Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Notes vagabondes - Page 26

  • Omer Avital Qantar : New York Paradox

    omer avital qantarTraversons l’océan Atlantique pour nous rendre du côté de New York et plus précisément dans le quartier de Brooklyn, là où le contrebassiste Omer Avital s’est installé durant les années 90. Un musicien qu’on surnomme parfois le « Mingus israélien », en raison de son énergie, celle des fondamentaux du jazz qu’il ne perd jamais de vue, mais aussi parce que ses groupes se présentent comme des workshops, ces ateliers collectifs qui prennent forme et s’élaborent autant par leurs timbres que par les personnalités qui les composent.

    À Brooklyn, Omer Avital a d’abord ouvert le Smalls, puis plus récemment le Wilson Live, qui est à la fois un lieu de répétition, de rencontre, d’enregistrement, de concert et de jam sessions, ce qu’il définit comme « un foyer créatif pour les musiciens de Brooklyn ». C’est là qu’il a mis sur pieds le quintet Qantar, une formation dont la fougue prend appui non seulement sur l’énergie du contrebassiste mais également sur une alchimie humaine dans laquelle le double souffle des saxophonistes Azaf Yuria et Alexander Levin est impressionnante. À leurs côtés, Eden Ladin au piano et Ofri Neheyma à la batterie. Quatre compagnons de route, israéliens eux-aussi et, tout comme leur patron, expatriés à Brooklyn. C’est d’ailleurs à l’époque du Smalls qu’ils ont connu sa musique avec laquelle ils ont grandi avant de travailler à ses côtés.

    Après un premier album éponyme, Qantar a publié New York Paradox chez Jazz&People et Zamzama Records. Cet album a été enregistré sans coupure ni montage au mois d’avril 2019 au Wilson Live, et c’est un beau coup de cœur que je tenais à partager dans ces Notes Vagabondes. Voilà un disque gorgé de swing et de blues, dans lesquels viennent se mêler des influences orientales connectées aux racines d’Omer Avital. New York Paradox révèle non sans une certaine fierté sa musique généreuse et passionnée. Et comme le soulignent les notes du livret : « Le jazz a d’abord été un art du mouvement, une pulsation liée à la vie, à la marche des hommes, une foulée chargée tour à tour d’espérance et de joie, de mélancolie et de légèreté, autant de sentiments qui transparaissent dans la musique d’Omer Avital et nous la rendent si chère et si attachante ».

    L’écoute répétée de New York Paradox confirme pleinement ces propos.

    [Album présenté dans L’Heure du Jazz n° 4 du 3 avril 2020]

    Musiciens : Omer Avital (contrebasse), Asaf Yuria (saxophones ténor et soprano), Alexander Levin (saxophone ténor), Eden Ladin (piano), Ofri Nehemya (batterie).

  • Un Poco Loco : Ornithologie

    un poco loco, ornithologie, parker, jazzUn Poco Loco tire son nom d’une composition de Bud Powell, que le groupe avait interprétée sur son premier disque en 2014. Mais c’est avant tout un trio atypique dans sa formule instrumentale puisqu’il se compose de Fidel Fourneyron au trombone, Geoffroy Gesser au saxophone et à la clarinette et Sébastien Beliah à la contrebasse. Pas de piano, pas de guitare, pas de batterie, ce qui représente un vrai défi dans la mesure où le troisième album de ce groupe condensé, Ornithologie, publié chez Umlaut Records, est intégralement consacré à la musique de Charlie Parker. Celui qu’on surnommait Bird, en français l’oiseau, ce qui bien sûr explique le titre du disque.

    Un défi, oui, mais parfaitement relevé et de surcroît avec cette pointe de folie qu’on connaissait déjà et qui n’étonne pas le moins du monde. Souvenons-nous qu’en espagnol, Un Poco Loco signifie « un peu fou ». Rappelons aussi pour la petite histoire que ces trois-là s’étaient auparavant attaqués avec beaucoup d’aplomb à un monument de la musique américaine, la comédie musicale West Side Story, en enregistrant Feelin’ Pretty, leur second disque publié en 2016.

    Un Poco Loco, c’est une manière très savante, et en même temps pleine de jubilation, de déconstruire la musique, ou plutôt de la déjouer, de la remodeler pour la reformuler et créer la surprise. Et bien loin d’être un hommage appliqué au saxophoniste, Ornithologie fourmille d’élans, de trouvailles individuelles et collectives. C’est un témoignage exemplaire du travail accompli par une « petite » formation qui sonne finalement comme un orchestre, dans lequel chaque musicien prend plaisir à multiplier les rôles. Une célébration festive de la musique de Charlie Parker, génie du jazz dont a récemment fêté le centième anniversaire de la naissance.

    [Album présenté dans L'Heure du Jazz n° 4 du 3 avril 2020]

    Musiciens : Fidel Fourneyron (trombone), Geoffroy Gesser (saxophone ténor, clarinette), Sébastien Beliah (contrebasse).

  • Shootin' Chestnuts : Naninani?!

    cj_Shootin-Chestnuts-NaniNani.jpgDu côté de chez Citizen Jazz, publication de Naninani?!, premier album d'un quartet électrique issu de la scène nancéienne sur le label du Bazardier.
    « Au jour du jugement dernier, l’auteur de ces lignes sera peut-être pointé méchamment du doigt pour avoir défendu sous l’effet d’un chauvinisme exacerbé la cause de Shootin’ Chestnuts, un groupe de musiciens habitant la même ville que lui, Nancy pour ne pas la cacher. Pour sa défense, une seule méthode : l’écoute répétée de Naninani ?! »

    Lire la chronique...

    Toutes mes chroniques pour Citizen Jazz...

  • Axiom Kilter

    kilter,laurent davidPour une fois, je vous invite à monter le son très fort, histoire de découvrir un trio de vilains garnements – je dis ça en toute amitié pour Laurent David que je connais bien depuis pas mal de temps – réunis sous le nom de Kilter. Cette formation surpuissante aux couleurs metal jazz publie son premier LP, Axiom Kilter, lui-même faisant suite à un EP sorti en 2018.

    Kilter est une aventure new-yorkaise emmenée par le bassiste qui vit aux États-Unis une partie de l’année. Pour mémoire, je vous rappellerai qu’on a pu l'entendre (ou l'écouter, c'est encore mieux) par le passé aux côtés de Guillaume Perret ou bien – mais ça c’était avant – d’Ibrahim Maalouf (ce que notre indulgence infinie lui pardonnera volontiers). Tout récemment, Laurent David s’est illustré aux côtés du pianiste Yvan Robilliard  et son trio YR3 pour l’album Big Rock. Un peu avant, ce fut un quatuor très inspiré incluant le saxophoniste Jacques Schwarz-Bart, Shijin. Ce bassiste aux longs cheveux et à la barbe fleurie est, vous l’avez compris, un musicien hyperactif, d’autant plus qu’on le retrouve à la manœuvre au sein de différentes formations qu’il dirige comme le groupe M&T@L ou The Way Things Go. Il est en outre très impliqué dans la vie de son propre label, Alter-Nativ, sur lequel paraît Axiom Kilter. Et je n’oublie pas non plus son album solo, Naked, qui a vu le jour sur le label Durance d’Alain Soler.

    À ses côtés au sein de Kilter, deux costauds : le batteur Kenny Grohowsky, entre autres compagnon de route de John Zorn, ainsi que le saxophoniste Ed Rosenberg III, fondateur du groupe de jazz métal Jersey Band. Autrement dit, et qu’on me pardonne cette expression triviale, c’est du lourd !

    Vous aurez compris que ce 33 tours tout rouge n’est pas vraiment une cure de repos, il laisse entendre une musique qui fait la part belle à un gros son virtuose et à une énergie très brute, mais magnifiquement orchestrée. À propos de gros son, notons la présence sur certains titres de Per Nilsson, guitariste du groupe de métal suédois Meshuggah et de la chanteuse suisse Andromedia Anarchia, elle-même très impliquée dans les musiques puissantes. Y a du cri dans l'air ! Mais voilà, c’est cela aussi le jazz – si tant est qu'il s'agit bien de jazz, mais quelle importance après tout ? – dans toute sa diversité et sa nature omnidirectionnelle : cette embardée vrombissante aux côtés du trio Kilter est un bel exemple de sa richesse. Et les amateurs de rock y trouveront leur compte, également. De quoi se plaint-on ?

    [Album présenté dans L’Heure du Jazz n° 8 du 7 août 2020]

    Musiciens : Ed Rosenberg III (saxophone ténor, contrebasse), Kenny Grohowsky (batterie), Laurent David (basse).

    kilter,laurent david

  • Synoptik Quartet : Passe Temps

    Synoptik_Quartet.jpgLe Synoptik Quartet est un quartet originaire de Nancy, emmené par deux jeunes musiciens : le saxophoniste (et flûtiste) Nicolas Gegout et le vibraphoniste Yragaël Unfer. Tous deux sont par ailleurs membres de l’EPO Trio sous la direction du percussionniste Guy Constant, que beaucoup de gens connaissent en Lorraine puisqu’il est un des acteurs majeurs des Enfants du Boucher, cette grande formation qu’on peut retrouver assez régulièrement dans les rues de la ville, notamment au moment des fêtes de la Saint Nicolas…

    Revenons au Synoptik : je me rappelle leur concert en première partie du Sand Quartet d’Henri Texier, lors de l’édition 2018 du festival Nancy Jazz Pulsations. Ce soir-là, le groupe avait fait montre d’une belle assurance, la complémentarité entre Nicolas Gegout et Yragaël Unfer ressemblait à une évidence, à voir comme à à entendre. On avait de plus pu noter la sensibilité et l’engagement du saxophoniste tout au long de concert.

    Le groupe a publié Passe Temps, son premier album, en autoproduction. Aux côtés des deux leaders, on trouve Julien Moneret à la contrebasse et un musicien bien connu par ailleurs, un homme du Sud qui a posé ses valises à Nancy et déjà pas mal roulé sa bosse (Ark 4, Ensemble Bernica, Tu Danses ?, Shoplifters…) : le batteur Christian Mariotto.

    Passe Temps a le charme d’une carte de visite qui déroulerait une musique tour à tour contemplative et énergique, parfois exploratoire. Et toujours très expressive. Nicolas Gegout et Yragaël Unfer se partagent les huit compositions. Leur jazz se présente dans un format assez traditionnel, mais de belle facture et je me permets de vous suggérer l’écoute du thème signé Nicolas Gegout qui ouvre le disque, « Kemissa’s Dance » et dont vous trouverez ci-dessous une version live. La belle cohésion du quartet, les accents orientaux, les interventions des deux leaders, quelques références directement Coltraniennes chez le saxophoniste, tout cela est une invitation au voyage.  Passe Temps est une promesse et le Synoptik Quartet une formation qu'on suivra avec plaisir. Sans doute lorsque ce satané virus aura décidé de nous ficher un peu la paix...

    [Album présenté dans L’Heure du Jazz n° 8 du 7 août 2020]

    Musiciens : Nicolas Gegout (saxophones ténor et soprano, flûte), Yragaël Unfer (vibraphone), Julien Moneret (contrebasse), Christian Mariotto (batterie).

  • John Coltrane (23.09.26 - 17.07.67)

    John Coltrane aurait eu 94 ans aujourd'hui. En quelques années, il aura bouleversé l'histoire du jazz, écrivant l'une de ses plus belles pages, sinon LA plus belle. Sa trajectoire - en particulier durant la période 1956-1967 - fut celle d'une comète et son influence sur les musiciens reste, aujourd'hui encore, fondamentale. La musique de ce génie n'a pas fini de vivre en nous.

    Je pense que Pascal Anquetil ne m'en voudra pas de citer ses propos au sujet de Coltrane, lui qui a eu la chance de le voir sur scène à Paris :

    « Né comme Ray Charles un 23 septembre, mais en 1926 à Hamlet en Caroline du Nord, John Coltrane aurait aujourd'hui 94 ans si... J'ai eu le bonheur de voir et d'entendre en concert le quartette de John Coltrane le 6 novembre 1963 à l’Olympia. Je garde encore en mémoire l’empreinte fossile du big bang qu’il provoqua en moi. Jamais un enregistrement ne pourra ressusciter l’intensité magnétique que dégageaient sur scène les quatre musiciens, ni reproduire la puissance “physique” du son de cathédrale de Trane au ténor. Jamais il ne pourra aussi restituer la dimension visuelle de ce tsunami sonore, comme ces images d’Elvin Jones, ses grimaces et ses grands moulinets dans l’espace. Comment un disque pourrait-il faire revivre un tel tintamarre incendiaire ? »

    Il n'y a rien à ajouter à des propos aussi forts, qui nous restituent par la seule force des mots la puissance magique de cette musique. Si ce n'est, par exemple, durant une quarantaine de minutes, et cet extrait d'un concert. C'était le 1er août 1965, à Comblain-la-Tour en Belgique.

    Place à John Coltrane...

    John Coltrane Quartet : 1er août 1965 - Comblain-la-Tour, Belgique.
    John Coltrane (1926-1967) : saxophone soprano ; McCoy Tyner (1938-2020) : piano ; Jimmy Garrison (1934-1976) : contrebasse ; Elvin Jones (1927-2004) : batterie.

  • Christophe Marguet Quartet : Happy Hours

    christophe marguet, , jazzQuelle carte de visite ! Non seulement Christophe Marguet fut durant de longues années le compagnon de route d’Henri Texier, mais ses propres formations, telle sa Résistance Poétique, ont déjà reçu de nombreuses récompenses. Le batteur évolue notamment aux côtés d’Yves Rousseau dans le quintet Spirit Dance, il a également constitué un quartet avec Sébastien Texier ; il joue en trio avec Guillaume De Chassy et Andy Sheppard ou bien encore dans le projet Looking For Parker de la saxophoniste Géraldine Laurent ; sans oublier sa collaboration en duo ou en quartet avec le saxophoniste allemand, entre autres membre du trio Das Kapital, Daniel Erdmann. Marguet est au centre d’une Constellation, par ailleurs nom d’un album magnifique dont j’avais salué les qualités il y a quelques années…

    Nous tenons donc avec lui un musicien hyperactif qui nous invite à partager les Happy Hours d’un nouveau quartet pour lequel il a réuni la contrebassiste Hélène Labarrière, le pianiste Julien Touéry et le trompettiste Yoann Loustalot. Du très beau monde, donc, pour une musique de toutes les attentions, dont la finesse mélodique puise son inspiration aussi bien dans le jazz que la musique classique, le rock ou la chanson. Il faut dire que ces quatre-là sont connus pour leurs appétits multicolores. L’ensemble ainsi formé est d’un lyrisme profond, il y a ici quelque chose qui s’apparente à de la joie, mais une joie consciente et altruiste, aussi bien par son interprétation d’une grande sensibilité que par une démarche collective empreinte d’humanisme.

    On ne peut qu’être touché par ce qui motive Christophe Marguet : « Par ces temps troublés, nous nous devons de tenter de véhiculer un peu d’espoir et de bonheur, de transmettre ce qui nous anime, nous donne à vivre. Nous avons très envie de partager avec vous ces moments furtifs, ces instants de joie, ces heures heureuses, indispensables à nos existences, moteur et raison d’être, de vivre et d’aimer ». C’est à se demander si Christophe Marguet, qui résume ainsi parfaitement l’idée de ses Happy Hours, ne tenait pas là des propos prémonitoires, peu de temps avant la pandémie et notre long confinement… Voilà un disque qu’on recommandera donc très chaudement.

    Pour terminer, précisons que plusieurs des dix compositions de cet album publié sur le label Mélodie en sous-sol sont dédiées à des musiciens essentiels dans le cheminement de Christophe Marguet : Eddy Louiss, Don Cherry ou Paul Motian, qui est pour lui une « référence permanente ». Christophe Marguet prouve ainsi qu’il est un musicien de « Haute-Fidélité », titre d’une composition de l’album dédié à ce grand batteur qui nous a quittés à la fin de l’année 2011.

    [Album présenté dans L'Heure du Jazz n° 4 du 3 avril 2020]

    Musiciens : Christophe Marguet (batterie), Julien Touéry (piano), Hélène Labarrière (contrebasse), Yoann Loustalot (trompette, bugle).

  • Yves Rousseau Septet : Fragments

    Yves_Rousseau_Fragments.jpgDu côté de chez Citizen Jazz, publication de ma chronique de Fragments, signé par le septet du contrebassiste Yves Rousseau sur le label Yolk.

    « Si la mémoire nous joue des tours, ceux-ci peuvent néanmoins se révéler heureux. C’est ce qui vient immédiatement à l’esprit à l’écoute des Fragments d’Yves Rousseau et de son septet. En convoquant ses souvenirs d’adolescence, le contrebassiste aurait pu se la jouer « revival » et laisser ses amours de lycée (Pink Floyd, King Crimson, Genesis ou Crosby, Stills & Nash par exemple) prendre le dessus sur sa propre musique. »

    Lire la chronique...

    Toutes mes chroniques pour Citizen Jazz...