Alban Darche : Le Gros Cube #2
Cube, Orphicube, Gros Cube… La géométrie d’Alban Darche décline une fois encore le chiffre trois pour notre plus grand plaisir. Plus que jamais, le saxophoniste voit grand en mettant sur pieds une formation aux dimensions XXL qui a des allures de fête. Rendez-vous compte : dix-sept musiciens, soit… trois de plus que dans la formule du premier Gros Cube et, quand on y songe, un nombre premier, s’il vous plaît. Premier, comme le talent conjugué de ces experts parmi lesquels on retrouve une bonne partie de sa garde rapprochée, en particulier un autre trio, Clover (Jean-Louis Pommier et Sébastien Boisseau), la cellule fondatrice du label Yolk sur lequel sort ce luxuriant Gros Cube #2. Ce big band généreux affirme en outre son envergure internationale puisqu’on peut y repérer par exemple l’Américain Jon Irabagon au saxophone alto ou bien encore l’explorateur helvète Samuel Blaser au trombone. Le casting est impressionnant et la musique ne l’est pas moins.
Avec ce qu’il présente comme une formule à l’américaine (cinq saxophones, quatre trompettes, trois trombones et un tuba propulsés par une rythmique piano, guitare, contrebasse et batterie), Alban Darche, dans un grand élan de gourmandise, pousse encore un peu plus loin le bouchon de ses rêves, lui dont la musique expressive veut allier exigence et limpidité : « Ce qui m’intéresse, c’est passer du familier au déroutant, offrir du déroutant qui sonne classique. Proposer des couleurs dans un paysage familier ou bâtir un paysage complexe avec des couleurs pourtant évidentes ». Le Gros Cube #2, pour ambitieux qu’il soit tant du point de vue de sa constitution que des objectifs que lui assigne son leader, est un pari audacieux – car il est assez fou d’échafauder, en nos temps épidémiques et de rigueur économique appliquée à un consensus mou, de telles formations qui seront considérées, soyons-en certains, non sans perplexité par les programmateurs du fait de leurs dimensions excessives – qui réjouira toutes les oreilles avides de ce jazz vibratoire qui s’offre comme un splendide voyage au pays du souffle et de la générosité.
Ce grand ensemble sonne avec l’élégance majestueuse que suppose sa texture instrumentale, en préservant les qualités qui font la musique d’Alban Darche, « populaire et intelligente », pour reprendre les propos d’un de mes chers camarades de Citizen Jazz. Quiconque connaît un peu le travail du saxophoniste sait à quel point ses compositions (c’est lui qui les signe toutes et les arrange) peuvent suggérer d’innombrables images en couleurs ou en noir et blanc, alternant motifs joyeux et nostalgiques. Comme un fil rouge amoureux tendu en permanence entre hier, aujourd’hui et demain.
Faut-il ajouter au constat de cette réussite collective que les solistes nous régalent d’interventions généreuses et habitées ?
Musiciens : Jon Irabagon (saxophone alto) ; Loren Stillman (saxophone alto) ; Alban Darche (saxophone ténor) ; Matthieu Donarier (saxophone ténor ; clarinette) ; Rémi Sciuto (saxophone baryton ; flûte) ; Joël Chausse (trompette) ; Geoffroy Tamisier (trompette) ; Jean-Paul Estiévenart (trompette) ; Olivier Laisney (trompette) ; John Fedchock (trombone) ; Jean-Louis Pommier (trombone) ; Samuel Blaser (trombone) ; Matthias Quilbault (tuba) ; Marie Krüttli (piano) ; Gilles Coronado (guitare) ; Sébastien Boisseau contrebasse) ; Christophe Lavergne (batterie).
Titres : À la bougie | Ping-Pong |Arcane XV – Le diable | Arcane XVIII – Le soleil |Le mort joyeux | Beauty and Sadness II |Le chemin (vertueux) |L’oiseau qu’on voit chante sa plainte |Arcane XXII – Le mat | Le cercle.
Label : Yolk Records.
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Prenez deux musiciens curieux de tout : le premier est hongrois, français d’adoption, le guitariste Csaba Palotaï ; le second est un Anglais, batteur percussionniste à haute teneur imaginative, Steve Argüelles. Considérez maintenant deux compositeurs majeurs du XXe siècle : Béla Bartók, tout aussi hongrois que le premier cité, ce compositeur souvent révéré par les musiciens de jazz, dont les Mikrokosmos demeurent une des œuvres pour piano les plus fascinantes, avec leurs jeux de rythmes et leurs inspirations multiples d’une incroyable modernité ; pour finir, pensez à un clochard céleste, l’américain Moondog, celui qui avait fait de la rue sa partition, inventant depuis sa cécité une musique répétitive et chantante tout aussi novatrice et, au besoin, créant ses instruments à partir d’objets trouvés.
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