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  • Pierre-Michel Sivadier : Mets du jour

    pierre-michel sivadierOn le comprend tout de suite : le titre de ce livre signé du chanteur pianiste Pierre-Michel Sivadier peut s’entendre de deux façons. Il peut s’agir d’une proposition gourmande (entrée, plat, dessert en quelque sorte), celle d’une lecture aux couleurs multiples d’un écrit assemblant, comme son sous-titre l’indique, « journal, musique et portraits ». Ou bien tout simplement d’une invitation à laisser entrer la lumière dans nos vies pour que puissent s’y épanouir désirs et passions, à condition toutefois que ces dernières ne s’éteignent pas. Après Paùl Jack, roman déjà paru aux éditions Stellamaris, celui qu’on connaît notamment pour trois albums de « chanson » affranchis des impératifs commerciaux du genre, des disques de l’ailleurs – D’amour fou d’amour, Rue Francoeur et Si – publie Mets du jour, un livre qui s’inscrit dans le contexte de la pandémie de coronavirus avec son avant, son pendant et son après. Composé de textes courts, finement ciselés dans une langue mi précieuse, mi rêveuse, là où le passé simple a encore droit de cité, à des années-lumière d’un « néo-parler » managérial qui voudrait abolir les temps et leur concordance, ce bel opus épris de vie livre confidences, emportements et admirations avec la simplicité d’un cœur qui bat fort. On tombe sous le charme de rencontres avec Barbara, Jane Birkin ou Fanny Ardant ; on découvre un poème dédié à Stella Vander ; de précieux musiciens viennent à nous, tels Christian Vander, Simon Goubert ou Michel Graillier. Voilà une étonnante et émouvante galerie de portraits souvent tendres, et l’impression de nous retrouver au centre d’un tourbillon où, finalement, c’est bien d’amour qu’il s’agit avant tout. Musique, cinéma, poésie, vie… leurs beautés et leurs contingences, tout un univers essentiel bousculé par la pandémie et le vacillement du monde qu’elle a engendré. C’est tout cela qui se joue dans ces quelque 170 pages différentes, vers lesquelles on peut revenir lorsque la grisaille surgit, parce que malgré ses inquiétudes, Mets du jour n’est pas une œuvre du renoncement. « Il faut saisir ce souffle, cette infime espérance ».

  • Régis Huby, Bruno Chevillon, Michele Rabbia : Codex III

    regis huby, bruno chevillon, michele rabbiaCent mots pour dire l’essentiel... C’est l’histoire d’une musique qui s’invente en même temps qu’elle brasse et fusionne les expériences parfois croisées de trois créateurs. Armés de leurs instruments mêlant acoustique et électronique, Régis Huby (violon), Bruno Chevillon (contrebasse) et Michele Rabbia (percussions) explorent des contrées brumeuses aux horizons sans fin. Sous la férule de Gérard de Haro, maître des sons, le trio sculpte une trame sonore aussi imprévisible que fulgurante. Tout en climats changeants, Codex III exerce une fascination qui est celle d’une énigme qu’on ne voudrait surtout pas élucider. Il faut s’abandonner à son mystère et regarder au loin. Soudain, la magie opère…

    Titres de l’album : Reflection on a Life in Motion (7:05) | New Chapter (10:11) | Dephts (5:44) | Another Face (5:32) | The Missing Page (5:35) | In the Distance (7:56) | Suspensive World (4:07).

    Musiciens : Régis Huby (violon, violon ténor, électronique), Bruno Chevillon (contrebasse, électronique), Michele Rabbia (batterie, percussions, électronique).

    Date de parution : 28 mai 2021 (Abalone)

  • Thibault Walter Trio : Le seul snob

    thibault walterIl est des disques qui savent vous prendre à contre-pied. J’entends par là des propositions musicales vous attirant dans l’instant du fait de leur singularité, quand bien même vous imaginiez avoir affaire seulement à une escapade en jazz de très bonne facture, comme il existe beaucoup, reconnaissons-le. Il est vrai que mes oreilles, les bienheureuses, ont ce privilège d’être régulièrement confrontées à de nouveaux albums. La plupart du temps cependant, ceux-ci ne paraissent pas suffisamment différents (novateurs, dérangeants, surprenants) pour que leurs pavillons décident de consacrer le temps nécessaire à l’écoute plus approfondie qu’ils mériteraient sans doute. La musique est un flux presque continu dont il n’est pas si simple d’émerger, on le sait, tout cela peut sembler cruel et injuste…

    Le Seul Snob – et sa galerie de titres en forme d’anagrammes sur lesquelles je vous laisserai le loisir de plancher, partant de l’idée que les deux premières pistes ont ce je ne sais quoi d’irrationnel – c’est certain, est de ceux qui vous mettent en arrêt. J’irai même jusqu’à dire de façon plus triviale qu’il est un sacré petit bonheur, décliné par trois musiciens dont l’association est assez originale. Thibault Walter est venu avec son drôle de piano préparé, un Yamaha CP70 couplé à une ribambelle d’objets divers (branches, caoutchouc, tees de golf, nous dit-on) ; Pablo Cueco l’un des Quiet Men du clarinettiste Denis Colin mais pas seulement car on le sait aussi écrivain, a fourbi son zarb, instrument à percussion iranien qui se joue à mains nues ; tandis que Loïc Ponthieux, de manière plus classique, s’est emparé de sa contrebasse. Voilà pour les éléments constitutifs de leur entreprise… Et c’est à partir de cette union que la machinerie musicale s’est, en apparence seulement, joyeusement déréglée, sans que jamais l’on n’imagine de la part des trois musiciens la moindre erreur de pilotage. Bien au contraire, c’est un peu comme si le trio avait voulu trouver un chemin filant en droite ligne vers son but, tout en sortant volontairement des rails, au prix d’un exercice d’équilibre qui vous donne le sourire. Quelle joie ! Les sonorités du piano gambadent au gré de la rencontre de ses cordes avec les objets évoqués un peu plus haut, frissonnant d’heureuses dissonances et de timbres inattendus, parfois difficiles à identifier (quelle importance après tout ?). On ressent d’imperceptibles décalages, savamment contrôlés, aussi bien dans le placement rythmique des instruments que dans les tonalités et voilà que petit à petit, cette matière sonore peu commune se forme jusqu’à un modelage se révélant naturellement harmonieux. Le voyage vers cet ailleurs voisin, pour intrigant qu’il soit, est tonifiant avant tout. Certains pourront vous dire que le trio joue faux et ils auront raison d’une certaine manière sauf que… ce faux-là, ce pas de côté malin est l’enfant d’une science heureuse, d’une impeccable mise en place minutieusement décrochée du sens commun. « India » de John Coltrane, la seule reprise du disque, ne semble pas se plaindre du traitement qui lui est réservé, bien au contraire. Le thème danse et chante. Comme tout le disque, dans sa frénésie pas comme les autres..

    La musique distille un groove mutin, joyeux, faussement bancal, dans la lumière d’une imagination fertile. On y revient, encore et encore, surpris d’avoir été surpris. Ce n’est pas si courant. Et c’est très bon…

    Musiciens : Thibault Walter (piano CP70 préparé) ; Pablo Cueco (zarb) ; Jean-Luc Ponthieux (contrebasse).

    Titres : RER Lointain (5:09) | Ralenti noir (5:03) | India (5:18) | Arme outrancière (3:20) | Âpre énigme (5:38) | Tribu (4:53) | Remontage caduc (4:41) | Sages renommées (3:33) | Pagnol dégraisse (3:54) | Le seul snob (4:45) | Test ORL quantique (4:39) | Un requiem est rempart (4:25).

    Label : Element 124 (3 septembre 2021)

  • Magma : Eskähl 2020

    magmaDu côté de chez Citizen Jazz, publication de Eskähl 2020, un double CD live enregistré en mars 2020 par Magma.
    « C’est cela qu’on aime chez lui et dans la musique de Magma : savoir qu’elle est là, présente, différente et profondément ancrée dans notre propre histoire depuis des décennies. Que les choses soient dites : on veut bien tourner d’autres pages et rester encore longtemps sur Kobaïa ».

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  • Thomas de Pourquery Supersonic : Back to the Moon

    thomas de pourqueryC’est le troisième périple pour Thomas de Pourquery et son équipage supersonique. Après avoir voyagé au cœur de la musique ô combien céleste et singulière de Sun Ra, puis mis le cap en direction d’un amour lui-même très spatial (Sons of Love), le saxophoniste chanteur, personnage haut en couleurs et maître de cérémonie d’un jazz à la fois débridé et heureux, revient pour nous embarquer, cette fois en direction de la Lune. Ce n’est pas lui faire injure que de souligner le plaisir de se retrouver – même si l’expression peut sembler ici étrange – en terrain connu. Tous ces élans, tous ces chants, tous ces appels lancés, toute cette force d’évocation… on les connaissait déjà et c’est bien eux qu’on attendait au moment de découvrir cette musique décidément heureuse. Comment ne pas vibrer à la verve collective qui s’empare de six musiciens dont on sait par ailleurs la capacité à transporter un public ? J’en ai personnellement été le témoin privilégié lors des derniers passages du groupe à Nancy Jazz Pulsations, en 2014 et 2017. Et je compte bien sur l’édition 2021 du festival pour recharger mes batteries en vue d’une prochaine expédition avec eux.

    Back to the Moon, dont on pressent que la composition titre pourrait être le prétexte à faire chanter le public lors des concerts, est de ces disques ouverts à bien des vents – comment s’en étonner d’ailleurs quand on sait que le groupe explore les grands espaces ? – dont les rêves sont aussi parfois ceux d’une musique aux couleurs plus pop que jazz (« I Gotta Dream » et son beat obstiné mis en couleurs par le synthétiseur presque vintage d’Arnaud Roulin). Parfois le temps est comme suspendu, c’est d’apesanteur qu’il est alors question (« Jungle »). On frissonne à des instants nostalgiques, presque désuets (les trois courtes séquences « Lullaby »), on croise d’improbables fanfares qui seraient descendues d’une planète visitée à l’occasion d’un vieux film de science-fiction (« Venusian Boys »). L’énergie ruisselle tout au long de ce disque (le blues latent de « Wolf Smile » ouvrant sur un duo saxophone alto - batterie aux accents free presque coltraniens). De Pourquery, pas tout à fait crooner mais séducteur tout de même (« Bring Me Back The Day », avec le renfort langoureux du saxophone ténor de Laurent Bardainne), émeut quand il chante « Yes Yes Yes Yes ». Le collectif est très uni, au point qu’on en vient à oublier qu’on a là affaire à la crème des acteurs d’un jazz d'aujourd'hui, porteur de toute son histoire bien sûr, mais en prise directe avec une esthétique et des préoccupations très contemporaines. Le Supersonic vient nous rappeler que jouer de la musique de jazz, c’est aussi danser, et chanter ! On serait tenté d’imaginer que le très beau thème de « Joy », presque un hymne, entonné par la trompette de Fabrice Martinez, est l’enfant du confinement et du désir de se retrouver un jour, enfin libres de nos mouvements. Écoutez sa pulsion finale et le groove puissant de la rythmique formée par Edward Perraud et Frédérick Galiay, telle une machine à délivrer de la joie et de l’espoir, sans compter. Mais le jazz signifie aussi prise de conscience et ouverture à l’autre, celui ou celle qu’on ne connaît pas, ainsi qu’en témoigne une reprise – encore un hymne ! – de Caetano Veloso (« O Estrangeiro ») magnifiée par la présence de musiciens congolais : « J’ai un peu arrangé ce morceau en allant au Congo, car il y a eu deux millions de déportés congolais en Amérique du Sud et leurs enfants sont revenus au Congo avec la Rumba, ce qui fait que cette chanson de Veloso est assez symbolique de ce lien qui existe entre le Brésil, le jazz au sens large du terme et la musique congolaise. Le message de cette chanson, c’est celui de l’universalité et du bénéfice qu’il y a à rencontrer des gens qui ne nous ressemblent pas forcément ».

    Que dire de plus sinon qu’un tel voyage en direction de la Lune (ou de toute autre univers restant à découvrir) est beau autant par la simplicité de ses intentions (celles du cœur, redisons-le) que par la force naturelle de son expression. La générosité de Thomas de Pourquery et de ses co-pilotes va vous faire du bien. Beaucoup de bien ! Et ne me dites pas que vous n'aimez pas le jazz, sinon je vous promets que votre voyage dans la Lune sera un aller simple...

    Musiciens : Thomas de Pourquery (saxophone alto, chant), Laurent Bardainne (saxophone ténor), Fabrice Martinez (trompette), Arnaud Roulin (claviers), Frédérick Galiay (basse), Edward Perraud (batterie). 

    Titres : Take-Off | Joy |Back to the Moon | Jungle | Lullaby (Sunrise) | Wolf Smile | I Gotta Dream | Venusian Boys | Yes Yes Yes Yes | Lullaby (Sunbeam) | Bring Me Back The Day | O Estrangeiro | Lullaby (Starnight)

    Label : Lying Lions Productions (17 septembre 2021).

  • John Coltrane : A Love Supreme

    john coltraneCent mots pour dire l’essentiel... L'histoire veut qu’au moment de quitter son domicile pour rejoindre les studios de Rudy Van Gelder à Englewood Cliffs en ce 9 décembre 1964, John Coltrane avait en tête toute la musique qu’il allait enregistrer avec son quartet. Au sommet de son art et d’un parcours fulgurant, le saxophoniste s’apprêtait ce jour-là à écrire une page majeure de l’histoire de la musique au XXe siècle. Les quatre mouvements du brûlant A Love Supreme s’enchaînent dans un seul souffle aux accents mystiques, formant une suite marquée par sa densité et un feu intérieur ayant conservé une exceptionnelle intensité par-delà les années.

    Titres de l’album : Aknowledgement (7:42) | Resolution (7:17) | Pursuance (10:42) | Psalm (7:02)

    Musiciens : John Coltrane (saxophone ténor), McCoy Tyner (piano), Jimmy Garrison (contrebasse), Elvin Jones (batterie).

    Date de parution : Janvier 1965 (Impulse!)

  • Yves Rousseau : Fragments

    yves rousseauCent mots pour dire l'essentiel... Amoureux du cinéma de Jacques Tati, de Franz Schubert comme de poésie – Léo Ferré, François Cheng –, en prise avec les éléments naturels de notre vie terrestre, Yves Rousseau sait écrire de magnifiques histoires en musique. Interprétés par un ensemble intergénérationnel, ses Fragments aux couleurs d’un jazz polychrome, parfois électrique, sont une évocation de ses amours pop-rock au temps du lycée. Ici, point de nostalgie ni même de regret d’un « monde d’avant », mais un fidèle et limpide reflet : celui de l’humanité qui habite un contrebassiste aux horizons multiples et sait toujours trouver le chemin de leur synthèse.

    Titres de l’album : Reminiscence (10:59) | Personal Computer (7:21) | Abyssal Ecosystem (5:11) | Darkness Desire (8:07) | Crying Shame (4:27) | Oat Beggars (4:24) | Winding Pathway (11:08) |Efficient Nostalgia (11:42)

    Musiciens : Géraldine Laurent (saxophone alto), Thomas Savy (clarinette basse), Jean-Louis Pommier (trombone), Csaba Palotaï (guitare), Étienne Manchon (claviers), Vincent Tortiller (batterie), Yves Rousseau (contrebasse, composition).

    Date de parution : 18 septembre 2020 (Yolk Records)

  • The Volunteered Slaves : SpaceShipOne

    the volunteered slavesDu côté de chez Citizen Jazz, publication de SpaceShip One, le cinquième volet des aventures de cette formation emmenée par le saxophoniste Olivier Temime.
    « En ces temps troubles de pandémie et de réchauffement climatique, il n’est jamais superflu de rappeler qu’une présence humaine peut aussi être symbole de générosité et de vibration positive. SpaceShipOne en est la preuve revigorante vers laquelle on peut revenir aussi souvent que nécessaire ! ».

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