Musique Action
Samedi 12 septembre 2020 - Centre Culturel André Malraux, Vandœuvre-lès-Nancy.
Première soirée en musique depuis une éternité. C’était il y a longtemps, avant. On parlait déjà d’un virus et d’une épidémie planétaire mais en ces temps reculés, on pouvait encore parler sans distance, se serrer la main, voire s’embrasser… Autant dire que même équipé d’un masque made in RPC, la perspective d’un concert est réjouissante.
Il faut pour commencer saluer l’énergie déployée par Olivier Perry et toute l’équipe du Centre Culturel André Malraux de Vandœuvre-lès-Nancy qui ont mis en place une « session de rattrapage » du festival Musique Action, après son annulation au mois de mai dernier pour cause de pandémie. Soit une soirée et trois concerts caractérisés par ce qu’on pourrait qualifier de cohérence dans l’éclectisme.
Nick Bärtsch et les percussions de Strasbourg - Photo @ ID-B
Tout a commencé avec le Suisse Nick Bärtsch et les Percussions de Strasbourg, venus présenter leur programme Shaker Kami. Entre élans rythmiques aux couleurs sérielles et musique minimaliste dans les entrelacements de laquelle on discerne l’influence de Steve Reich par instants, les cinq musiciens sur scène ont conquis un public certes masqué mais captivé par un ensemble à la précision étourdissante, dans une tension maintenue du début à la fin.
Louis-Michel Marion - Photo @ ID-B
Une première désinfection des fauteuils et c’est au tour de Louis-Michel Marion de présenter en solo (mais avec une partie enregistrée) deux œuvres signées par des compositrices. C’est d’abord Stronghold de Julia Wolfe, tout en puissance répétitive, sinuosité et engagement physique ; puis Listen To Yourself de Eva-Maria Houben, qui donne à écouter tout autant le silence ou ce qu’il convient de nommer stase que la musique elle-même, suspendue au frémissement imperceptible de l’archet. On retient son souffle.
Caravaggio - Photo @ ID-B
Encore une désinfection et le groupe Caravaggio vient conclure la soirée en proposant pour l’essentiel le répertoire de son dernier disque, Tempus Fugit. Est-ce l’heure tardive ? La longueur excessive des réglages de l’électronique entre chaque morceau ? Le port du masque si difficile à supporter au bout de quatre heures ? Difficile de trancher, mais la puissance créative – entre rock, jazz et musique contemporaine – de Bruno Chevillon (basse), Éric Échampard (batterie), Benjamin de la Fuente (violon, guitare, électronique) et Samuel Sighicelli (claviers) a semblé un peu bridée, ne trouvant pas toujours la voie pour libérer ses forces très électriques. On aurait envie de les retrouver dans un contexte plus favorable, parce que les images mentales qu’ils savent projeter (tous les quatre sont aussi des amoureux du cinéma) s’avèrent vite fascinantes.
Fin de la soirée. On se dit que le menu était copieux et de qualité, avec un programme à la fois exigeant et ouvert. Et si bien des incertitudes continuent de peser sur la vie de la musique vivante, on aime à penser ce Musique Action condensé en une session de rattrapage est venu au bon moment. Merci à celles et ceux qui lui ont permis d’exister.